Humaniser l'humanité
« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », disait le philosophe grec Héraclite, il y a de cela 2 500 ans. À l'aube du troisième millénaire, la seule permanence étant le changement, cela suppose que la loi de l'évolution est inéluctable et que tenter de prévoir l'avenir, c'est apprendre à apprendre. C'est pourquoi la formation continue est essentielle à tout individu, à toute organisation. Changer, c'est créer. La créativité favorise la floraison des compétences et des performances. Créer, c'est évoluer. Évoluer, c'est réaliser le meilleur de l'humanité en nous. Comme je suis un artiste multidisciplinaire, créer sans cesse donne un sens à ma vie et chez moi la dimension rationnelle, que nourrit la philosophie, ne se détache jamais de la dimension émotionnelle, que nourrit l'art. Il peut même m'arriver, au cours d'une conférence, de chanter une chanson dont le texte répond à la thématique abordée ou, en atelier, d'en créer une avec le groupe ou encore d'initier une oeuvre collective et d'y participer : peinture, sculpture, collage poétique, etc.
Le deuxième point d'appui de ma pensée fut l'homéostasie, concept biologique qui définit l'état de santé d'un organisme vivant et dont la fonction est de maintenir l'équilibre entre ce qui était et ce qui sera : demeurer le même tout en changeant ou conserver tout en transformant. En ce qui concerne les organisations, ce principe, qu'on pourrait appeler « la voie du milieu », devient le fondement logique de l'intergénérationnel et nous enseigne que les savoirs acquis par les aînés doivent être transmis aux jeunes, qui les peaufineront. L'application de ce principe permet également de transcender les polarités en percevant les contraires (notamment les différences culturelles) non plus comme des opposés mais comme des complémentaires : entre la raison et le coeur, entre l'utile et l'agréable, entre nos différences et nos ressemblances, entre l'expertise et l'humanisme, il faut choisir les deux.
Oeuvrant dans le monde des grandes organisations depuis une quinzaine d'années, c'est à la demande du secteur des ressources humaines, des sciences sociales et de la culture que je suis devenu conférencier et formateur. En méditant sur la structure des systèmes dans la nature, où tous les niveaux sont en interaction dynamique, j'ai trouvé un troisième point d'appui, typiquement écologique, au contenu de mes conférences : l'interdépendance de l'être humain et de son environnement naturel et culturel. Comme l'unité dans la diversité des identités et des fonctions conditionne une productivité heureuse et une rentabilité croissante, je suis persuadé que le point d'Archimède de cette unité est le respect de la personne, moteur de sa motivation et de sa créativité. Toute organisation dont la philosophie est humaniste remportera rapidement le gros lot. L'humanisation des relations interpersonnelles à tous les échelons de toute hiérarchie est la première chose qui ne doit jamais changer.
Lorsque je sors d'une conférence avec le sentiment que j'ai pu créer un climat de réciprocité, de solidarité, de convivialité, je sens que l'humanité a un sens : la coévolution.